Publié le 09/04/2016

Les secteurs qui recrutent….qu'en est-il réellement ? - 1/3

Les secteurs qui recrutent….qu'en est-il réellement ? - 1/3

Par Rémy Dreano.

 

Régulièrement, la presse économique se fait l'écho des secteurs qui recrutent ou qui vont recruter dans l'année. 

De ce point de vue, on peut regretter que certains emballements ne soient pas toujours à la hauteur des espoirs qu'ils font naître chez les demandeurs d'emploi.

L'esprit critique du journaliste est trop souvent pris en défaut. Comme on le sait, certains secteurs ont un besoin impérieux de communiquer auprès de leurs actionnaires et d'adresser simultanément un message fort à la concurrence.

L'audit, la banque, les ESN (ex SSII) sont passés maîtres à ce petit jeu. On a vu par le passé des communications tapageuses faire un flop monumental. On peut regretter que ces mêmes médias se bornent à inventorier les promesses en oubliant systématiquement de faire l'analyse du verbatim.

 Suivre la courbe du chômage est assez anxiogène. Alors, dès qu'une entreprise annonce des créations d'emplois à deux ou trois chiffres, la presse s'en fait aussitôt l'écho, le suivisme faisant le reste qui pousse à relayer complaisamment des chiffres parfois exagérés, voire même fantaisistes.

Quant à la filière miracle, celle qui va régler pour de bon la question du chômage de masse, c'est plutôt l'apanage du politique et de ses communicants.

Au début des années 90, nombreux sont ceux qui ont pronostiqué un raz de marée d'embauches dans la fonction publique, une fois, bien sûr, débarrassée de ses baby-boomers. On sait ce qu'il en est advenu. Ce que nous voyons aujourd'hui, c'est une vaguelette qui vient mourir sur une plage ventée. 

Plus récemment, c'est le secteur des énergies renouvelables qui nous a été vendu comme "la solution" pour demain. Un gisement d'un million d'emplois ont promis certains... Loin d'être un indécrottable pessimiste, il m'arrive aussi de m'enthousiasmer et d'y croire. Mais prudent je reste, car je sais d'expérience l'effet délétère que ces annonces produisent sur des chômeurs anxieux et désabusés.

On parle beaucoup en ce moment de l'éolien off-shore. Force est de constater que le décollage est moins spectaculaire que prévu et que, s'il y a malgré tout, à Saint-Nazaire comme ailleurs, quelques centaines emplois qui se créent, c'est moins souvent au profit de l'économie locale et de ses chômeurs. Les grands gagnants des marchés publics sont des groupes danois comme Dong Energy ou allemands comme Siemens.

Et que dire de nos fleurons tricolores ? EDF est encore actif s'appuyant sur sa stratégie de joint-venture alors qu'Areva, qui a d'autres chats à fouetter, se retire du jeu sur la pointe des pieds. Et puis, que penser de l'Allemagne, championne des énergies renouvelables, qui s'est reconvertie contre toute attente aux vertus du charbon ?

On voit bien qu'il n'est pas si aisé de renoncer aux énergies fossiles et que, sans la manne publique, les filières peinent à se développer. En tout cas, les fameux emplois verts promis il y a cinq ans ne sont pas encore au rendez-vous des espoirs suscités. Et quand ils sont là, c'est souvent la formation qui n'est pas disponible sur le local ou qui fait défaut...

L'enthousiasme s'est donc déplacé sur les objets connectés, ces objets de consommation pas toujours pérennes et qui ne sont pas non plus de première nécessité. Pour créer des emplois, encore faut-il que nous ne nous contentions pas de célébrer la créativité de nos startups et la qualité de notre R&D. Le vrai défi, c'est d'industrialiser l'innovation et de parvenir ensuite à exporter les produits. 

Fort heureusement, nous avons des entreprises qui maîtrisent ce savoir-faire. Des artisans, des PME, des grands groupes qui en ce moment recrutent.

Alors, quels sont ces secteurs qui promettent et qui tiennent leurs promesses ? 

Ayant assez critiqué, je ne peux me dérober à l'exercice. Voici donc une première liste de trois secteurs qui recrutent. Une dizaine d'autres suivront très bientôt...

  • Construction aéronautique

Les recrutements sont largement ouverts mais le problème est que les entreprises ont du mal à trouver les compétences qu'elles recherchent. Les écoles sont mises à contribution pour rattraper le retard, mais le mal est fait. Quel dommage  !

Et pour éviter que la pénurie de talent ne s'éternise, on s'intéresse aux salariés de l'automobile comme main d'oeuvre à reconvertir pour des métiers tels que monteur-câbleur, monteur-électricien. On recrute actuellement des chaudronniers (métier pénurique par excellence), des tourneurs, des fraiseurs, des soudeurs TIG, des monteurs, mais aussi des cadres techniques et des ingénieurs. 10.000 personnes devraient être recrutées cette année par les constructeurs et les équipementiers. Les trouver n'est pas une mince affaire...

Car on recrute aussi dans bon nombre de bassins d’emploi. Ainsi, la filière NAE (Normandie AéroSpace) fait état de 400 postes à pourvoir pour les cinq prochaines années. 105 postes sont actuellement disponibles sur le site.

Les équipementiers sont présents dans bon nombre de régions et des forums sont régulièrement proposés pour permettre de rencontrer les employeurs. L’intérim est aussi un bon moyen pour mettre le pied à l’étrier. Toutefois, les exigences restent élevées et de ce fait, les entreprises peinent à trouver les profils adéquats.  

Seule ombre au tableau, l'aviation d'affaires qui tarde à redécoller. 

  • Construction automobile

Le secteur a repris du poil de la bête et les recrutements sur site s’accélèrent pour les agents de production. L'autre signe rassurant, ce sont les cadences en augmentation dans les fonderies d'aluminium.

Renault avait promis des embauches sur ses usines de Douai, de Flins, de Cléon et du Mans et il tient ses promesses. De son côté, PSA mise plutôt sur l'alternance. Fin 2015, le groupe a décidé d'allouer une prime d'intéressement à ses salariés, ce qui ne s'était pas vu depuis quinze ans. 

 

On peut citer aussi Toyota qui recrute via l'intérim des agents de production pour son usine d'Onnaing, avec quelques CDD et CDI à la clé. Certes, les volumes restent encore assez modestes mais, comparé aux années 2009-2013, il est réjouissant de constater ce regain de postes en CDI, après ces années moribondes. 

Dans un marché de l’emploi qui reste toutefois fluctuant et incertain, l’intérim est le meilleur moyen de mettre le pied à l’étrier. Les agences Pôle emploi situées à proximité des bassins de production sont également en première ligne.

Les équipementiers suivent le mouvement avec un léger décalage et recrutent à nouveau depuis septembre dernier. Chez les équipementiers, c’est l’innovation qui prime actuellement. De ce fait, les ingénieurs R&D sont très courtisés… Les ingénieurs en systèmes embarqués manquent à l'appel, étant déjà très courtisés par l'aéronautique et le ferroviaire.

La génération Z sait que l'industrie automobile est soumise au yoyo, ce qui ne facilite guère les vocations.

  • Construction nautique et navale

Voilà deux filières sur lesquelles peu d'experts pariaient il y a peu et qui pourtant commencent à récolter les fruits des efforts poursuivis dans un contexte économique et politique particulièrement défavorable. 

Des efforts d'innovation notamment qui valent aux chantiers STX de Saint-Nazaire d'engranger tout récemment une méga commande d'un croisiériste pour quatre paquebots géants.

 

Une commande qui lui assure de garantir l'emploi jusqu'en 2024, une lisibilité sur le futur qui n'a rien à envier à celle d'Airbus. En vérité, il s'agit d'un redressement spectaculaire quand on sait, qu'il y a quatre ans, l'entreprise n'était pas loin de jeter l'éponge. Et il n'y a pas que STX, d'autres chantiers de construction, de réparation ou de refit ont retrouvé de l'élan. C'est le cas de Piriou à Lorient, de Socarenam à St-Malo et Boulogne-sur-mer et de CMN qui a signé en janvier un gros contrat avec l'Arabie Saoudite, avec la perspective d'un nouveau chantier à Cherbourg.

On recherche actuellement des chaudronniers, des soudeurs TIG, des tuyauteurs, des charpentiers métaux et sur bien d'autres métiers encore, tant en production qu'en conception et fonctions support. Malheureusement, l'éducation nationale ne forme plus guère de tôliers, chaudronniers, soudeurs ou ajusteurs et l'AFPA ne peut à lui seul répondre à tous les besoins.

Quant à la construction nautique, on peut dire qu'elle retrouvé une petite brise dans ses voiles, non pas sur le marché intérieur, plutôt atone, mais à l'export.

La filière a ses fleurons industriels comme BenneteauDufour ou encore Jeanneau et compte environ 5.000 entreprises employant au total près de 45.000 salariés. Si la filière a traversé quelques plans sociaux, elle a fait mieux que résister en misant sur l'excellence. Des efforts de diversification qui permettent à Multiplast, spécialiste des matériaux composites haute performance pour monocoques et multicoques de compétition, de s'agrandir et de lancer la fabrication d'un 4ème Hall à Vannes (56). Ayant des difficultés à recruter sur le local, l'entreprise a pris le taureau par les cornes et monté son propre centre de formation composites.

La filière recrute des menuisiers, des stratifieurs, des opérateurs composites, des agenceurs nautiques, mais pas seulement... La main d'oeuvre fait actuellement défaut et c'est pourquoi, en Bretagne notamment, l'appareil de formation est fortement mis à contribution. Ainsi, l'AFPA d'Auray forme pour CDK Technologies actuellement (voir plus bas).

Ces deux filières sont essentielles à notre économie puisque fortement exportatrices. En global, elles représentent près de 70.000 emplois. Pour celles et ceux que ces filières attirent, il faudra être présent au prochain Salon Pro&Mer au Quartz de Brest, le 12 janvier prochain.


Quelques autres entreprises du nautique et du naval
CDK Technologie*, JFA chantier naval, DCNS, CMA CGM, Damenshiprepair, UFAST, CNB, H2XFountaine Pajot, Rhéa marine, CouachAmel, TofinouCNB ProIncidences Sails, Lorima,OceaCNM, IDB marineChantier naval TrapaniPlastipêcheChantiers Hervé, Atlantic Refit CenterChantiers du GuipShipelec, Vauquiez, Nautitech, NavaluTransmétal IndustrieNormandie RefitIMS Shipyard, EteliumTimolor, CompositeworksBicsport, Epoh. North Sails France (voilerie), HDS Design (un bureau d'études)…

*Urgent ! CDK-Kéroman Technologies recrute des opérateurs composites. Formation proposée par l'AFPA d'Auray. Recrutement via Pôle emploi Lorient. début de la formation : le 25 avril 2016

On tentera bien sûr d'en savoir plus sur les embauches réalisées à la fin de l'année. Et pour en savoir plus, rendez-vous sur la version en ligne du Guide des ressources emploi !

Série à suivre avec, prochainement, un point sur :  la maroquinerie de luxe,  le Jeu vidéo, le cycle, les métiers du bien être et de la beauté, le funéraire, les métiers de bouche, la mécanique de précision, la transformation numérique (data, logiciel…, la sécurité privée