Publié le 07/10/2015

Une reprise d’entreprise réussie : Nicolas Nansot, 38 ans, artisan huilier

Une reprise d’entreprise réussie : Nicolas Nansot, 38 ans, artisan huilier

Propos recueillis par Rémy Dreano.

 

Après un BTS en génie civil effectué en alternance dans une entreprise qui l'initie à l’encadrement de chantiers et une succession de missions en cabinet d’architecte, Nicolas Nansot se prend à rêver d’une nouvelle vie…

“Au bout de dix années à faire des plans dans des cabinets d’architecte, on finit par vouloir faire autre chose…

...Ce n’est pas le contexte économique, car je gagnais bien ma vie. Après mon BTS en alternance, j’avais décroché un CDD de six mois dans mon entreprise d’accueil. J’ai pu obtenir à la suite la prise en charge d’une formation au logiciel Autocad et c’est ainsi que je suis devenu dessinateur industriel…” 

Par souci de préserver une certaine liberté, Nicolas Nansot choisit alors de privilégier l'intérim. Ce passionné d’écologie ne sait pas encore à quel point cette passion allait changer le cours de sa vie….

 “J’ai commencé assez tôt à prendre conscience de l’importance du bien manger, du manger bio. A l'époque, j'ai pris sur mes congés pour faire une petite formation en maraîchage bio. J’ai quand même repris à la suite un CDI pour le chantier du tramway de Paris.."

Encore et toujours des plans…mais l’idée du maraîchage bio n’est pas abandonnée pour autant, seulement mise entre parenthèse.

“Finalement, j’ai pu négocier une rupture conventionnelle et obtenir une formation plus longue en maraîchage par la région Centre"

Et Nicolas de quitter aussitôt Paris pour la région Bourgogne.

“L’idée de faire avec la terre et de mes mains m’a poussé à me documenter et à rencontrer des agriculteurs. C’est ce qui m’a permis de décrocher un job à mi-temps dans une ferme de maraîchage biologique, un CDD simplifié au début… “

Plus précisément, un TESA MNS, une mesure de simplification pour faciliter l’embauche de travailleurs saisonniers dans l’agriculture. Nicolas passe progressivement à plein temps.

“Outre les récoltes, je m’occupais de la vente sur les marchés, une fonction multi-tâches donc"

C’est justement une rencontre sur les marchés qui fit basculer le destin.

“J’ai fait la rencontre de Christian Vilain, un artisan qui vendait ses huiles sur les marchés. Je suis devenu client de son huilerie. Trois ans plus tard, devinant qu’il était proche de la retraite, je lui ai fait comprendre que je pourrais être intéressé par la reprise de son entreprise. J’étais déjà à fond dans la démarche de faire mon alimentation..”

Plus tard, alors qu'il est arrêté quelques jours pour un mal de dos, Nicolas décide de lui rendre une petite visite sur son exploitation, près d’Auxerre. Bien lui en pris, car ce fut le point de départ d’une nouvelle aventure professionnelle. La possibilité d’une reprise d’entreprise était là, à portée de main...

“C’était en octobre 2013. Je suis rentré à la maison et j’en ai tout de suite parlé à ma compagne, car une reprise d’entreprise, c’est autant une prise de risque qu’un grand changement de vie..”

Décision est rapidement prise. Nicolas monte son dossier avec l’aide d’un comptable et se rend à la Chambre économique d’Auxerre avec son budget prévisionnel sous le bras…

“C’est à ce moment que l’on réalise l’importance des expériences professionnelles antérieures. Même si pour moi, c’était plus un projet humain qu’une question de business plan, il n’y a pas de place pour l’improvisation. Pour convaincre un banquier de vous prêter 40.000 euros, il faut se préparer…”

La Banque populaire accorde le crédit et, après une brève période de passage de témoin, notre jeune repreneur d'entreprise trouve son local à Saint-Père-sous-Vézelay, un haut lieu de fréquentation touristique en saison. En fait, une grange de 70m2 appartenant à la Mairie. Un emplacement jugé malgré tout idéal par Nicolas, outre un petit loyer mensuel modéré.

“Il a fallu tout de même faire d'importants travaux d'aménagement avant de pouvoir commencer. La municipalité a pris à sa charge une petite partie des travaux, j’ai fait le reste avec un ami…” explique Nicolas.

Notre jeune artisan déménage le matériel, achète ses premières graines et commence à presser.

“J’ai repris officiellement l’huilerie en février 2014, sous le statut d’entreprise individuelle (E.I) et emménagé à St-Père en juillet.  J’ai adapté la méthode de travail et choisi de presser en plus petite quantité. Mes huiles sont ainsi consommées fraîchement pressées (huile de courge, de cameline, de noix,... selon la saison). Il faut créer de l’intérêt et c’est pourquoi, je presse devant le client. Je laisse les tourteaux (résidus de pressage) dans des sacs bien en vue…".

 

 

Un couple, attiré par les effluves qui s’échappent dans la rue, pénètre dans la boutique. Les sacs de tourteaux et la machine de pressage aiguisent leur curiosité. Nicolas en profite pour engager la conversation et leur proposer une dégustation. Questionné sur les sacs de tourteaux, il explique aux visiteurs du jour qu'ils sont pour la plupart comestibles et qu'il les revend aux éleveurs comme compléments d’alimentation animale. Pour Nicolas, c'est presque la routine.

Outre une sélec­tion rigou­reuse des grai­nes biologiques issues des meilleures cultures agricoles, Nicolas anticipe la demande de ses clients, n’hésitant pas à parcourir des kilomètres pour retrouver une graine rare ou ancienne.

“Ma demarche tient plus du réseautage, du bouche à orielle et des rencontres. Récemment, à la demande d’un client, j’ai même prospecté par annonce pour retrouver l'ancêtre du Colza, la "navette", un graine peu cultivée et qui donne une huile au goût de choux et de moutarde...”.

 

L’été est propice aux affaires. Il faut se démultiplier sur les marchés, les foires et à la boutique.

“Pour l’heure, je suis seul et ma trésorerie n’est pas encore suffisante pour embaucher quelqu’un. Je vis encore sous le seuil de pauvreté mais je suis épanoui et, pour moi, c'est l'essentiel...”

…et pour son comptable aussi qui voit le chiffre d’affaires augmenter mois après mois. Outre les clients de passage, quelques touristes belges, hollandais, allemands et autres habitués, Nicolas a prospecté quelques restaurateurs et boutiques jusqu'à la capitale, une dizaine pour l’heure, qui revendent ses produits.

“Bien sûr, il y a parfois des petits moments de doute. Le poids des charges, la réglementation tatillonne, c'est pesant. Mais quand je trouve un nouveau restaurant qui va mettre en valeur mon produit, c’est bien sûr tout bénéfice, mais c'est aussi la satisfaction de voir mon travail reconnu…"

. Nicolas NANSOT 

23, rue de la Mairie

89450 Saint-Père-sous-Vézelay

Tél : 06 66 87 13 15