Publié le 19/04/2015

Plongeur-démineur de la marine nationale, une formation de préparation unique en France

Propos recueillis par Rémy Dreano au Lycée Simone Weil.

Rencontre avec Michel Ravoisier, capitaine de corvette et responsable de la formation de plongeur-démineur, en partenariat avec l’Éducation Nationale pour le recrutement externe.

- Vous êtes enseignant dans un lycée professionnel, avec le statut de militaire à la fois. C'est assez rare pour être signalé, non ?  

- Mon parcours n'est effectivement pas banal… J'ai intégré le lycée Simone Weil comme maître auxiliaire de maintenance navale. Passionné de plongée, j'avais déjà mon brevet d'état de plongeur et, durant mes congés, il m'arrivait de donner des cours de maintenance navale dans un centre de formation aux métiers de la plongée professionnelle sur Port-en-Bessin (14).

En 1996, j'ai saisi l'opportunité d'en prendre la direction. Deux ans plus tard, j'ai repris contact avec mon ancien établissement qui venait d'ouvrir une section post-BEP en mécanique navale en partenariat avec la Marine nationale. C'est ce partenariat unique en son genre qui m'a convaincu de revenir sur Conflans-Ste-Honorine pour en prendre les rênes. 

- Quelle est la genèse de cette formation préparant au métier de plongeur-démineur ?

- Ce rapprochement avec l'amirauté a été particulièrement fructueux puisqu'il a débouché sur la création en 2006 de cette formation de préparation au cours de plongeur-démineur, unique en France. Nous avions identifié ce besoin spécifique de la Marine nationale. Restait à monter un projet solide pour convaincre mon administration et trouver les financements nécessaires. Cela a mis deux ans à mûrir.

- Pouvez-vous nous présenter la formation. A qui s'adresse-t-elle et quelles sont ses modalités d'accès et de financement notamment   ?

- La formation est gratuite et accessible avec un baccalauréat. Je précise que l'internat est obligatoire…La formation est financée pour partie par la Région Ile-de-France (lycée) et par la Marine nationale pour l'essentiel. Quand on sait qu'un "Crabe" (matériel spécifique du plongeur-démineur) coûte près de 40.000€, on mesure l'importance d'un tel soutien. 

- Nos jeunes viennent de toutes les régions. La moyenne d'âge est de 20 ans avec des baccalauréats de spécialités diverses. Si la plupart d'entre-eux ont pratiqué la plongée comme loisir, ce n'est pas une exigence de départ, la motivation et le mental sont en revanche déterminants…Nos candidats sont soumis ensuite à des examens physiques et médicaux très poussés. Nous n'en retenons que 12 par session.

- On sait peu de chose sur ce métier de plongeur-démineur et encore moins sur la nature des enseignements préparatoires. Que proposez-vous de particulier ?

• Outre les enseignants généraux théoriques (maths, physique, anglais…), les élèves passent les permis côtier et hauturier, le niveau III de plongée, le classe 1B (travaux sous-marins civils), le certificat de plongeur Nitrox et le certificat de secourisme (RIFA). Ils apprennent également à souder, à usiner (tournage, fraisage), sans compter d'autres contenus transverses. La polyvalence est essentielle et nous visons à bien les positionner pour le futur. Nous devons penser à la reconversion au sortir de la carrière militaire et leur permettre de s'employer dans le civil. Cette formation, c'est autant une école de la vie qu'une école des métiers.
  
  
  

- Où plongez-vous ici-même ? 

- Nous utilisons la fosse de plongée du Centre aquatique (20 mètres) qui se trouve à une encablure du lycée et la base de loisirs de Cergy. On nous questionne souvent sur le choix de notre installation en Ile-de-France plutôt que sur le littoral. C'est oublier que la Seine traverse Conflans-Ste-Honorine et que cette ville est riche d'une tradition batelière, avec ses métiers portuaires. Et puis plonger en eau vive, c'est autre chose. L'autre raison, c'est que nous avons ici des institutions et des élus qui nous soutiennent...

 Que se passe-t-il à l'issue de cette formation ?

 - A l'issue de cette préparation, les élèves quittent l'établissement à la mi-avril pour se rendre à Saint-Mandrier, près de Toulon. Cinq semaines de formation et d'examens... Ceux qui satisfont à tous les critères entrent au cours de plongeur-démineur à l'École de plongée pour 9 mois…Suite à leur formation ils sont affectés dans l’un des groupes de plongeurs-démineurs de la Marine (GPD) à Toulon, Cherbourg ou Brest ou sur un chasseur de mines.…

Ceux-là signent alors un contrat de dix ans avec la marine nationale comme plongeur-démineur. On pense tout de suite aux opérations extérieures…mais il faut savoir que, depuis la fin de la 2ème guerre mondiale, des mines ou munitions diverses sont régulièrement trouvées en mer ou sortant du sable. Il faudra bien une centaine d’années de plus pour s’en débarrasser. Le rôle du plongeur-démineur est d’intervenir en surface ou jusqu’à 80 mètres de profondeur pour identifier, classifier et le cas échéant, procéder au déminage des engins explosifs.

- Et que deviennent les autres élèves ?

- Il n'y a pas de perdant puisque tous auront passé le certificat de plongeur de bord qui ouvre sur une cinquantaine de métiers de la marine (bosco, manoeuvrier, détecteur, timonier…).

- Et pour vous, où se trouve la satisfaction ?

- Ce qui me plait, c'est de voir nos élèves évoluer, se souder au fil des mois, prendre de l'assurance et devenir performants dans tous les aspects de leur futur métier.

Et puis, j'ai la chance d'appartenir à deux institutions à la fois, un pied dans l'une, un pied dans l'autre. Ce n'est pas toujours facile, mais c'est riche et stimulant. J'ai d'ailleurs passé un certain nombre de diplômes de la Marine nationale et j'ai le grade d'officier. Si la carrière dans l'armée est relativement courte, l'évolution y est plus rapide qu'ailleurs. En tout cas, l'emploi est au bout du parcours...

Pour en savoir plus : contacter le CIRFA le plus proche ou, mieux encore, contacter le Lycée Simone Weil  : 8, rue du Val d'Oise 78700 Conflans-Sainte-Honorine : m.ravoisier@wanadoo.fr