Publié le 11/04/2020

Impact Covid-19 : Petit écho des filières n° 5 (11/04/2020)

Impact Covid-19 : Petit écho des filières n° 5 (11/04/2020)

Par Rémy Dreano.

 

Depuis le début de la crise sanitaire, le Guide des ressources emploi s’efforce de relayer les situations secteur par secteur, au fil de l’eau, en fonction des informations disponibles (à trouver en rubrique Actualité Éco de nos fiches).

Les situations ne sont pas uniformes. Si les entreprises ont nettement réduit la voilure et/ou mis leurs salariés en télétravail, certaines sont restées sur le pont qui continuent même de recruter (logistique, transport, énergies, agriculture, agroalimentaire, santé, sanitaire et social…). D’autres se préparent déjà à la sortie de confinement (cabinets d’expertise-comptable, Tech, startups du numérique…). 

Voici, un nouvel état des lieux que nous espérons le plus fidèle possible à la réalité du moment. La France est au ralenti… pas à l’arrêt.

Pour ce « Petit écho des filières n°5 », voici les secteurs traités :

• Bois - Forêt - Transformation du bois
• Banque 
• Cinéma d'animation - Jeu vidéo
• Marketing digital - e-commerce
• Bibliothèque - Médiathèque - Documentation
• Hôtellerie - Restauration - Casinos
• Droit - Justice  (Avocature - Magistrature, Notariat)
• Funéraire

• Transport de personnes (rail, bus, cars)
• Artisans taxi - VTC
• Social : Education spécialisée 

Bois - Forêt - Transformation du bois

Le contexte de crise sanitaire avec ses mesures de confinement voit l’industrie du bois réduire son activité. Or, la filière bois, c’est aussi la production de palettes bois, sans lesquelles les livraisons ne peuvent se faire. Il faut aussi livrer les papeteries, les cartonneries pour permettre l’approvisionnement des biens essentiels (produits d’hygiène, emballage de médicaments). L’ensemble de la filière bois-forêt est quand même déstabilisée. Les commandes se sont réduites peu à peu, leurs clients étant eux-mêmes à l'arrêt comme ceux du BTP notamment qui les sollicitent habituellement pour les résineux. Beaucoup de scieries ne produisent plus, se contentant d'écouler les stock. Les ventes de bois sur pied sont reportées. Les professionnels sont prêts à participer à l’effort de la nation mais craignent des conséquences pénales. Le confinement actuel et son probable prolongement nécessitent des réponses appropriées et rapides. C’est le sens du message adressé au gouvernement par la Fédération Nationale du Bois.

Banque 


Les banques sont tenues d’assurer la continuité des activités, étant vitales à l'économie. Si l'ouverture des banques est une obligation, cela ne signifie pas que l'ensemble du personnel soit présent à l'agence ou au siège. En fait, 60 à 70% des collaborateurs de la banque sont en télétravail, les autres sont encore présents physiquement dans leurs agences (les commerciaux notamment). Faire respecter les gestes barrière à certains clients irrités de ne pas trouver tous les services habituels, leur faire comprendre que leur banque se recentre sur les missions essentielles, ne va pas toujours de soi. Il faut quand même pouvoir apporter des réponses aux questions que posent les clients particuliers et les entreprises (surtout en ce moment). Les clients peuvent demander un rendez-vous pour des besoins plus urgents  comme les demandes de prêts garantis par l’Etat pour les entreprises notamment ou encore les prestations sociales à La Poste. Permettre aux entreprises de continuer à fonctionner et assurer les besoins de première nécessité sont les priorités du moment.    

Cinéma d'animation - Jeu vidéo

Les syndicats professionnels ont demandé de  » faire baisser le risque »  lié à la période d’épidémie de Covid-2019. Concernant la programmation des films d’animation, les professionnels ont proposé un filet de sécurité pour ne pas décaler les sorties de films. Le SPIAC sonde actuellement le milieu pour faire remonter les situations et évaluer les conséquences pour chacun des métiers concernés. Quant aux développeurs de jeux, artists, ils sont pour la plupart en télétravail. Les nouveaux jeux seront quand même retardés car on ne peut pas tout faire en télétravail. Une minorité de salariés continue de se rendre au bureau pour gérer les affaires courantes. Au moins, les ventes de consoles et de jeux vidéo explosent (+ 155% au niveau mondial). Le semaine précédant le confinement a vu les consommateurs se ruer dans les magasins spécialisés, entraînant des ruptures de stock inédites. L'eSport apparait comme le nouvel eldorado. Le jeu vidéo est un des rares secteurs à pouvoir sortir indemne la crise sanitaire, ce qui n'est pas le cas du cinéma d'animation.

Marketing digital - e-commerce

Le e-commerce est un des rares secteurs à être moins affecté par la crise sanitaire. 94% des sites de e-commerce sont toujours ouverts. 76% des sites ont quand même enregistré un recul des ventes depuis le début du confinement. Malgré cela, on observe quand même une hausse spectaculaire du trafic avec des taux de transformation élevés qui s’expliquent par un nombre plus élevé de consommateurs confinés, plus demandeurs puisque les boutiques sont fermées, et aussi plus disponibles. Mais, en principe, on ne peut pas tout commander. Le web marketing se met un peu plus en sourdine. Les annonceurs n’ont pas tous déserté, mais dans les entreprises, on ressent quand même l’impact de la crise sanitaire. Les campagnes web marketing sont repoussées par crainte d’être mal reçues et celles qui se poursuivent doivent être repensées. Selon le coeur de cible, il y a des gagnants (santé/pharma) et des perdants (hôtellerie-tourisme, spectacle-événementiel). Après les réunions de crise en visioconférences, les salariés en télétravail se projettent déjà sur l’après confinement. Mais, il n'est pas dit que tout repartira comme avant.

Bibliothèque - Médiathèque - Documentation

L’épidémie du Covid-19 et décision de fermer, jusqu’à nouvel ordre, tous les lieux recevant du public non-indispensables à la vie du pays entraîne la suspension des activités des bibliothèques, médiathèques et centres de documentation dans l’attente d’un retour à la normale. La consigne est claire, chacun doit rester confiné chez soi et se mettre en télétravail si possible avec ses logiciels métier en ligne ou un accès à son système intégré de gestion de blibliothèque (SIGB). Mais, il ne faut pas se leurrer, c'est un travail plutôt allégé sauf pour les plus créatifs, mordus de travail. A noter que les salons E-Expo et Documation, Data Intelligence Forum ont été reportés à fin mai. 

Est-le moment pour déposer une candidature ? Pas vraiment...Pour autant, il ne faut pas négliger de consulter les banques d’emploi. Ainsi, étonnamment, le CEPID propose plus d'offres d'emploi que d'habitude, en lien ou pas avec l’actualité. 

Hôtellerie - Restauration - Casinos

La réouverture des établissements n’est pas pour demain et c’est une catastrophe économique majeure pour le secteur. Les restaurateurs et hôteliers ne se faisaient guère d’illusions sur leur sort mais conservaient quand même un petit espoir. Emmanuel Macron a douché cet espoir en précisant en effet que les restaurants, cafés resteront fermés au delà du 11 mai. Les hôtels eux n’ont plus de clients. Pour l’heure, les pertes s’accumulent au fil des semaines. Il est difficile de prévoir les conséquences économiques pour le secteur, d’autant qu’aucune information rassurante n’est donnée pour l’heure, hormis quelques vagues promesses qui ne sauveront pas les établissements fragiles. Ce n’est pas un hasard si les premières cessations de paiement enregistrées dans les tribunaux de commerce proviennent du secteur. Le Groupement National des Indépendants de l’Hôtellerie-restauration (GNI-HCR) prévoit que 20% à 30% des établissements adhérents pourraient disparaître si la situation ne s'améliore pas avant l'été. Certains restaurateurs se sont reconvertis dans les repas à emporter ou livrés à domicile, mais ce n’est qu’un pis-aller. Et, si l’on regarde du côté de la Chine, on devine que les clients ne vont pas revenir en masse de sitôt. 

Droit - Justice  (Avocature - Magistrature, Notariat)

La justice continue mais au ralenti. Un quart de l’activité est maintenue. Les mesures de confinement s’appliquent aux tribunaux administratifs et à leurs personnels, ainsi qu’aux études notariales. Seules les activités essentielles des tribunaux sont maintenues (urgences pénales, gardes à vue, audiences en correctionnelle, comparutions immédiates). A noter que des frictions sont apparues entre professionnels de l’immobilier et notaires, ces derniers étant accusés de bloquer des transactions du fait de la fermeture de leurs études. Un tout récent décret les autorise dorénavant à signer les actes notariés à distance. Pour les avocats, les problèmes s’additionnent. Après la grève des avocats contre la réforme des retraites, voici le temps du confinement dicté par l'épidémie de coronavirus. Les avocats pourraient perdre 50% de leur chiffre d’affaires cette année. Certains vont avoir du mal à sortir indemnes de la période, leur trésorerie ayant déjà servi à éponger leurs deux mois de grève, sinon plus. Il aura de la casse cette année....

Funéraire


(il faut bien en parler !) Les opérateurs funéraires sont dans le dur et craignent d'être submergés par la vague. Le rite funéraire est très perturbé car il faut prendre en charge le quotidien, lui-même bousculé par la crise sanitaire et la prise en charge simultanée et rapide des personnes décédées des suites du coronavirus. Rien n'est simple... Entre le risque de pénurie de cercueils, la crainte d'être contaminé, les familles en colère, le téléphone qui sonne sans discontinuer, l'intendance qui ne suit pas, le secteur des pompes funèbres se sent très seul et se vit comme le mal aimé. Les cérémonies d’obsèques étant limitées au premier cercle familial, les frictions ne sont pas rares. Les professionnels s’estiment faire partie des oubliés et attendent de l’Etat une clarification et des mesures appropriées. N’étant pas considéré comme un service d’urgence sanitaire, les masques de protection font encore défaut. Pour l’heure, les thanatopracteurs ont reçu pour consigne de ne prodiguer aucun soin aux victimes du coronavirus. Les professionnels du funéraire encaissent, font le dos rond et font le travail qu'ils ont toujours fait.

Transport de personnes (rail, bus, cars)

L’épidémie du Covid-19 entraîne pour un certain nombre de sociétés de transport l’arrêt des activités jusqu’à nouvel ordre. C’est le cas des cars scolaires du fait de la fermeture des écoles, des cars de tourisme du fait du confinement et de l’interdiction des voyages longue distance. La Fédération a d'emblée exigé la création d'un fonds de garantie pour prévenir les faillites. S’agissant des TER, RER, tramway, métro, bus, on est déjà une offre réduite du fait de la baisse de fréquentation et des personnels devant assurer la garde de leurs enfants depuis la fermeture des établissements scolaires. Les recrutements en cours sont logiquement suspendus dans l’attente d’un retour à la normale. Pour la SNCF, la facture risque d’être très lourde. Une grève dure et longue pour commencer, suivie d’une période de confinement d’une grande partie de la population, tout cela n’est pas bon du tout pour une entreprise déjà très endettée.

Artisans taxi - VTC

L’épidémie du Covid-19 entraîne une baisse des activités de 30% à 70%. Clients et chauffeurs commencent à manquer à l’appel depuis l’instauration des mesures de confinement, les déplacements des français devant être limités au strict nécessaire. Depuis, l’activité des VTC a fortement chuté, une conséquence aussi de la pénurie de masques de protection. Ceux qui travaillent habituellement sur les aéroports sont encore plus à la peine, le trafic aérien étant quasiment à l’arrêt. Les professionnels réclament des consignes plus claires pour leurs clients et pour eux-mêmes, ce pour éviter aussi d’être verbalisés. Les plus téméraires se sont mis au transport de personnes qui doivent impérativement se rendre à leur consultation dans les hôpitaux (chimiothérapies, dialyses). D'autres transportent les personnels soignants. A chaque fois, il faut systématiquement désinfecter le véhicule. Le chiffre d'affaire a fondu, mais tout le monde n'a pas la possibilité de s'arrêter. Certains veulent aussi être utiles. Tous feront leurs comptes plus tard.

• Social : Education spécialisée 

La crise sanitaire avec ses mesures de confinement éclaire un peu plus encore les difficultés du secteur de l’Aide sociale à l’enfance et à l'adolescence, avec ses foyers gérés par des associations accueillant des mineurs et des jeunes majeurs présentant des handicaps, des troubles sociaux, comportementaux, psychiques. Face à la détresse sociale, morale, familiale, face aux risques de fragmentation sociale, le rôle des travailleurs sociaux est plus crucial que jamais Les salariés doivent maintenir l'activité dans les établissements accueillant des enfants et adolescents, tout en se protégeant de la contamination et des conséquences plus inédites du confinement. Mais l’absentéisme gagne, des éducateurs spécialisés sont tombés malades, d’autres font jouer leur droit de retrait et ceux qui restent sur le pont sont épuisés, stressés et inquiets. Plus stressés encore sont les EJE et les aides médico-psychologiques qui travaillent d'auprès d'autistes avec des commandes de masques qui n'arrivent pas, qui vivent aussi dans l’incertitude permanente d’avoir pris, ou non, les bonnes décisions pour protéger leurs résidents. Beaucoup d'éducateurs spécialisés étaient déjà au bord de la rupture avant même l'arrivée de la pandémie et, pour certains, c'est trop. On commence à mesurer les effets délétères du confinement sur les personnes suivies notamment par la protection de l'enfance, du handicap. Les foyers pour mineurs sont au bord de l'explosion (bagarres, tentatives de suicide). On demande aux éducateurs de rue de télétravailler et de produire des rapports sur ce qu'ils font, ce qui est pour le moins paradoxal. Les professionnels lancent un appel à l'aide. Pour eux, le cœur du système est clairement menacé.